Un homme d’affaire qui prend la décision de tout lâcher, une jeune femme qui allie études et job à mi temps en tant que femme de chambre. Deux personnes à un carrefour de leur vie, c’est cela que filme avec brio Pascale Ferran dans Bird people, présenté à Cannes à Un Certain Regard.
Dès la première scéne déjà, j’étais emportée. J’avais déjà aimé la façon de filmer une gare – cette fourmilière humaine – dans des films comme Gare du Nord ou plus récemment Eastern Boys : c’est encore plus fort cette fois ci. Il faut voir comme elle filme ces corps en mouvement, ces individualités allant et venant avec un but précis parmi cette foule en mouvement perpétuel.
Et puis, qui n’a jamais levé les yeux pour qu’ils viennent se poser un instant sur les gens qui nous entourent dans le métro, le RER ou le train et se mettre à divaguer en imaginant leurs pensées, leur vie. Le rendu est sublime et déjà, l’on se sent comme ce petit oiseau, là tout près qui nous écoute, nous regarde, nous espionne et sait tout de nous.
C’est ensuite vers un film en deux partie, chaque partie étant dédiée à l’histoire de l’un des personnages (l’homme puis la femme) que la réal « se », et « nous » dirige. Vont-il se rencontrer au sein de cet hôtel luxueux mais dénué de toute vie, de tout échange ?
Le film est tout à fait réaliste et vient évoquer des sujets sociaux majeurs tels que le mal logement, la précarité des « petis jobs » : CDD et autres missions de courte durée, le burn out professionel ou du moins la folie du rythme suivi par certains hommes d’affaires.
Le film ne se veut jamais un amat de poncifs, c’est bien plus fin que cela. Il y est question de cet hôtel grandiose et très haut (le Hilton pour ne pas le citer) duquel les fenêtres ne s’ouvrent que jusqu’au premier tiers. Par sécurité oui bien sûr, mais ne pourrions-nous pas y percevoir autre chose ? L’Homme souhaite aller toujours plus haut, toujours plus loin mais a t-il ensuite matière à vraiment profiter de cet « habitat », de cette position sociale ? C’est là, la question soulevée par le personne masculine du film. Quid de notre place dans cette société qui impose sans cesse de garder un rythme effréné au risque de se perdre en chemin ?
C’est donc dans une troisième partie que le film touche du doigt le côté fantastique. Je ne vous en dirai pas plus mais il y est question de conte de fées quelque peu remixé, de féérie et de surréalisme pour au final, nous permettre de nous implanter encore un peu plus dans les propos que la réalisatrice souhaite partager avec nous qui sont eux bel et bien réels.
C’est profond, bien plus complexe qu’un film à prendre au premier degrés, c’est nuancé en fait car ce n’est pas tant qu’il faille prendre le film à dixième degrés, c’est seulement qu’il est plus intéressant de le prendre à « plusieurs degrés », plusieurs niveaux de lecture sont possibles, au même titre que la vie. En cela, nous sommes face à une oeuvre riche et complète. Legère et profonde. Une belle envolée.