Grosses attentes et déceptions.
J’ai vu ce matin les attendus The Killing of a sacred deer du réal grec qui avait eu un prix pour son Lobster il y a deux. Je l’avais découvert grâce aux conseils avisés d’un festivalier et avais eu un réel coup de coeur pour ce film unique et singulier mais aussi très bien pensé et écrit. J’avais aimé l’absurdité qui s’en dégageait.
De l’absurde il y en a encore dans ce conte de vengeance. Mais bien trop peu au final pour en faire un film marquant et fort.
Collin Farrell et Nicole Kidman sont mariés et les parents de deux jeunes ado qui voient leur état de santé se dégrader de jour en jour, sans raison apparente.
Au bout du « chemin » Un maître chanteur de mauvaise augure près à se venger d’un forfait commis quelques années auparavent annonce la couleur au père de famille : ce dernier doit choisir entre l’un de ses deux enfants pour sauver sa propre peau et celle de sa famille, du moins des membres qui resteront.
Moui… C’est froid et sans fond véritable. De la froideur il y en avait déjà dans son précédent opus mais quelque chose se passait, quelque chose filtrait. Ici, le film a eu du mal à me garder éveillée même si je reconnais aux acteurs et au film – très bien mis en scène avec des plans répétitifs mais franchement intéressants et « parlants » des qualités cinématographiques indéniables.
Je ne parviens pas à ce stade à savoir ce que le réal a tenu à nous montrer. Veut-il évoquer une société défaillante qui doit faire le choix de grandes frustrations pour remonter la pente et sauver sa peau ? Rien n’est clair et limpide.
Je ressors avec le sentiment d’un film froid, sans calcul, but ni dessein bien précis et délimité. Décevant donc. Le papier glacé, très peu pour moi.
Est venue ensuite l’heure du Haneke. Grand maître cannois titulaire de 2 palmes d’or et en effet, maître de l’ordre du cinéma brut, aride, sans concession.
Ce Happy end est une sorte de suite de Amour (Palme d’Or 2012). Papy (JL Trintignant, grandiose de simplicité) en a ras le bol de vivre depuis qu’il a étouffé sa femme malade, sa fille (Isabelle Huppert, toujours parfaite) a trop de choses en tête entre son amoureux, son fils dépressif et la fille de son frère qui débarque à la maison après que sa mère soit morte d’overdose de médoc. Bienvenue chez les bourges névrosés.
Pour ainsi dire j’aurais pu m’endormir pendant la première partir du film. Je ne voyais pas du tout où tout cela menait. Et puis Dominique Besnehard et JL Trintignant apparaissent à l’écran pour une petite coupe rafraîchissante et les choses évoluent. Je m’intéresse enfin à ce qui se passe sur mon écran. Mais gosh quelle distance prise avec son sujet ! Je lisais ce matin les mots d’Haneke qui disait « espérer que son film ne soit pas perçu de façon trop brutale »… Hum comment te dire Michael : lorsqu’il est question de ton cinéma, on en attend de la brutalité, c’est ce pourquoi nous t’aimons et ce que nous venons voir ! Nous attendons que tu nous montres la rudesse et la brutalité de la vie et de notre condition. Ce que j’ai vu à l’écran n’est que petite transgression sympathique. Déception donc. Les propos tenus à demi mesure, très peu pour moi.
Mais cette fin… délectable je dois dire !
La suite de cette journée se fit en toute simplicité aux côtés de la crème du cinéma français, j’ai nommé Mesdemoiselles / Mesdames Huppert, Deneuve, Binoche, Béart… pour un hommage à Monsieur Téchiné et la projection de son nouveau film. Si le film, qui raconte l’histoire vraie d’un couple dont le mari, déserteur de la guerre de 14, en vient à se travestir pour échapper à la police, m’a déçu – Céline Sallette est parfaite et Téchiné aime à montrer la mue de ses personnages comme à chaque film, mais j’ai trouvé ce portrait à la docteur Jeckill et mister Hyde quelque peu longuet – je dois vous dire que ce moment de convivialité passé avec ce parterre de stars m’a comblée.
Cannes est définitivement un temps à part dans nos vies qui nous invite à partager des moments forts avec ceux que nous voyons sur nos écrans toute l’année durant, et qui nous invitent tantôt au rêve, au voyage, à la réflexion… Comme pour nous redire que le cinéma crée des ponts, relie les gens d’où qu’ils viennent et quel qu’ils soient. C’est puissant et jubilatoire. Cannesque en fait !