Autant le dire tout de go, ce film est un bijou. Passé le moment (je ne révèle rien puisque l’intrigue du film est révélée dans la bande annonce) où j’ai douté deux secondes du réalisme de la situation (un mec agissant comme le fait Yannick se fait dégager par la sécurité du théâtre au bout de 2 secondes trente de prise de parole), j’ai été totalement immergée dans ce film d’une délicatesse outrancière.
On parle du potentiel comique du comédien et de la situation, mais c’est surtout pour ce qu’il dit de la société, de l’état délétère de notre société que j’aime ce film. Tout simplement, sans fioriture aucune, Quentin Dupieux dit le marasme de cette congrégation malade qui intoxique certains d’entre nous. Sans aucun doute les plus doux, les plus purs, les plus délicats et réfléchis.
Yannick est de ceux là. Je pense encore à lui trois jours après l’avoir rencontré dans un cinéma de Marseille. Il est sans aucun doute un être humain formidable, rendu précaire, malade, abimé par une société en proie à la perdition, à la plus grande des violences : celle qui blesse l’âme.
Ce film, mini, d’une durée de 1 heure et 7 minutes est un joyau. Il offre à ses personnages la possibilité d’étoffer un jeu que l’on connaissait déjà : je pense ici à Pio Marmai qui ne m’a jamais autant fait penser au grand Patrick Dewaere. Et à ce nouveau venu (pour moi car j’étais passée à côté de lui jusque là) Raphael Quenard, qui par son phrasé et cette façon de se mouvoir m’a émue dès les premières minutes. Le rôle est fait pour lui, sur mesure. Il dit tout avec une vérité implacable. Une gageur dans ce monde de faux semblant où il est plus valorisé de se cacher derrière une attitude que de dire et parler vrai.
Il dit ici le ras le bol qui est le sien. Dans cette société où on nous enjoint à la légèreté, à la bienveillance et au bien vivre ensemble, alors que la réalité d’une majorité est toute autre et d’une violence sans nom (cumul de travails pour joindre les deux bouts, violence au quotidien due à la hausse des prix, injustice sociale…)
Yannick dit tout cela en filigrane, sans lourdeur aucune, en se jouant des codes du théâtre de boulevard.
Sans aucun doute mon film préféré de Mr Oizo et un film qui compte pour ce qu’il dénonce du marasme économique et surtout humain dans lequel nous évoluons désormais.
Le dernier plan est glaçant. J’aime et respecte énormément le choix de Quentin Dupieux d’utiliser sa voix, son art pour dire les dangereuses dérives du gouvernement en place.
Du rôle social et politique du cinéma.