Si ce film dit, illustre une chose : c’est bien qu’un établissement scolaire n’est rien d’autre qu’une mini société.
Et moi qui aime dire que le cinéma se veut et se doit d’être un miroir de nos sociétés : je ne peux qu’être happée par ce film totalement illustrateur de ce propos.
Ce film allemand présenté à la Berlinale et digne représentant de son pays à l’Oscar du meilleur film étranger, frappe fort, et voit juste.
Plusieurs générations, issues de milieux sociaux et culturels différents, ce lieu tout à la fois vaste mais morcelé, délimité et stratifié qu’il convient d’habiter, au sein duquel il faut prendre sa place, savoir se faire petit, trouver son espace propre, laisser la place… Ou encore la place et le rôle des média et leurs méthodes parfois tout à fait « spéciales ».
Carla Nowak (je ne sais pas pourquoi mais j’extrapole en pensant à la célèbre actrice de Hitchcock) est professeure principale d’une classe de 5ème. On la sent largement investie auprès d’élèves qu’elle respecte et traite tels ses semblables : c’est à dire comme des êtres humains, certes plus jeunes qu’elles, envers qui elle a le devoir d’enseigner, mais des êtres humains responsables, en passe de devenir des adultes libres.
C’est en cela que lorsqu’une série de vols se déclare au sein du collège et que des méthodes peu respectueuses du bien humain sont mises en place, elle s’insurge.
Non il n’est ni délicat, ni acceptable de demander à des élèves de sortir leur portefeuille pour que ces derniers soient fouillés par les responsables de l’établissement, non il n’est pas acceptable de demander à des élèves de faire de la délation et de livrer le nom de « ceux dont le comportement » pourrait laisser croire qu’ils ont volé.
Très vite, c’est Ali qui est soupçonné. Un élève d’origine turque. On convoque ses parents qui eux mêmes doivent se justifier et finalement, à juste titre s’insurgent. C’est dans la première partie du film sur cet angle que se focalise ce film très bien ficelé. Sur les facilités qu’ont certaines personnes à trouver des boucs émissaires. Toujours les mêmes profils…
Et puis le film s’ouvre sur une autre dimension alors que l’affaire, elle, se referme autour de cette brave et digne enseignante prise à son propre piège de vouloir solutionner un problème qui restera irrésolu. Comme en mathématique, parfois il y des inconnues et certains problèmes ne trouvent jamais de solutions. Or les énigmes mathématiques passionnent les gens depuis des générations !
C’est sur ce parallèle là que se noue le coeur du film, et nous sommes emportés au coeur de l’enquête.
Outre cette mise en lumière d’une société qui met en confrontation et en opposition les gens, le film dit aussi les limites de cette société « zéro tolérance » qui voudrait que nous visions l’excellence, que nous soyons performants à tout prix. Or l’échec à son importance. Justine Triet l’a d’ailleurs si bien redit lors de l’excellent discours si bien amené qu’elle a délivré lors de la réception de son prix à Cannes. La directrice de l’établissement qui n’accepte pas les dérapages réalisera à ses dépens (ou pas) les dégâts que peut causer une telle mentalité. On a tant besoin de secondes chances. De pouvoir se relever. Car l’échec est formateur. Peut-être même la première des formations. A condition qu’il soit accompagné de ce qui semble être notre sel et notre socle à tous : le degrés de confiance que l’on place en chacun d’entre nous.