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Le vide de l’existence

Posted by adminBarbara

Un nouveau film de Woody Allen c’est toujours un événement. Pour moi en tout cas…

Malgré des lacunes énormes que je tarde à ratrapper – je n’ai découvert Woody qu’en 2004 avec Melinda et Melinda (oui j’ai honte car la liste des films que je dois rattraper est plus longue que celle des films que j’ai déjà vus) et n’ai cessé d’admirer ce réalisateur depuis. Match Point étant le grand point d’orgue de cette filmographie, et soit dit en passant, sans doute mon film préféré.

J’ai, dès lors, suivi les hauts (Vicky Cristina Barcelona) et les bas (assez nombreux) du réal boulimique (1 film par an). Je puis dire que Blue Jasmine, mon dixième Woody donc, est « un haut ».

De retour dans son fief (les US) après une escapade européenne, Woody Allen renoue avec son génie, sa verve, son énergie et son inspiration. Blue Jasmine recoupe l’essence du cinéma Allenien. Y est filmée la grande bourgeoisie, son ascension et sa décadence : toutes deux fulgurantes.

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Woody filme la désillution comme personne. Le personnage central de Jasmine / Janette permet dès les premières secondes de planter le décor. Cette femme est à bout de souffle aux sens propre comme au figuré. Elle a tout perdu. Au final, elle n’a perdu « que » son mari et son argent mais avait-elle autre chose que ce mari et cet argent en sa possession ?

Jasmine est l’incarnation du vide. Un système de flashbacks, nous permet de faire des incartades dans son passé et ainsi comprendre sa vie, son histoire. Sans doute promise à un avenir brillant, elle arrête ses études très rapidement après avoir rencontré celui qui deviendra son époux quelques mois plus tard, pour vivre avec lui une vie faite de réceptions, de paillettes, de shopping et de pilates. Le programme est certes très alléchant mais mieux eut valu qu’il se mêlât (j’espère que vous notez les efforts de conjugaison) à une « vie intérieure » riche. Or Jasmine n’a aucune aspiration si ce n’est que de vivre sa vie de princesse aux côtés de ce mari qui n’aime en elle que son prénom exotique, qui n’est d’ailleurs pas son vrai prénom c’est vous dire à quel point tout cela est voué à l’échec (« I fell in love with the name Jasmine » : certes c’est mignon mais à l’image du manque de profondeur de toute leur histoire).

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Forcément, lorsque tout s’écroule, elle se retrouve vidée, là encore dans tous les sens du terme.

La scène d’ailleurs durant laquelle on apprend que son mari a été arrêté et que le fils quitte le domicile familial m’a beaucoup touchée. Son monde s’écroule. Elle n’a plus rien. De là, son visage change et son expression ne sera plus jamais la même.

Le vide l’entoure, le vide la comble…

C’est chez sa soeur, qu’elle a toujours quelque peu reniée, qu’elle va tenter de rebondir. Cette soeur caissière dans un supermarché, mariée à un beauf, qui bien sur ne répondait en rien à la dimension sociale que Jasmine entendait donner à sa vie.

Oui forcément, Woody adore confronter les classes sociales et les mettre en perspective. Il fait cela avec brio. Moi qui n’aime pas l’idée de mettre les gens dans des cases – ce que notre société adore faire – je trouve qu’Allen touche du doigt la réalité. Il est certes pessimiste et adore mettre en avant sa vision cynique de la vie mais il dit vrai lorsqu’il pointe du doigt un déterminisme social qui a réellement un fort impact dans notre vie à tous (j’abordais ce point dans un film vu dans le cadre du Grand Prix Cinéma ELLE la semaine dernière, Suzanne).

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Le scénario, les dialogues, la réalisation, les prises de vue, l’interprétation : tout est parfait. Oui, Cate Blanchet incarne cette femme qui a réellement atteint ses limites, cette femme en bout de course avec brio. Je n’ai pas été bluffée par une interprétation à ce point depuis Joaquin Phoenix dans The Master dont je vous parlais en début d’année. C’est au delà du jeu, au delà du « simple » rôle. Cate Blanchet a donné vie à cette femme. Sentiment très étrange qui forcément, prouve le talent et l’envergure de l’actrice.

Pour tout vous dire, Jasmine m’accompagne encore, même si cela fait plus de 48 heures que j’ai quitté la salle de cinéma. J’en serais presque à me demander ce qu’elle fait, si elle va mieux. C’est vous dire à quel point le film m’a parlé.

Je suis la dernière a vouloir classer, noter ou encore comparer les films que je vois – du moins ce blog n’a pas vocation à cela – mais je puis dire que si Match Point occupe toujours la première place de ma cinémathèque idéale (c’est le film parfait selon moi), cette Jasmine devient une héroine dans mon cinéma à moi, une icône de la décadence de la bourgeoisie, l’incarnation même du mal être de nos sociétés.

Du grand cinéma. Merci et bravo Monsieur Woody Allen.

 

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2 thoughts on “Le vide de l’existence

  1. Gérard Bladie

    Je partage votre impression, les personnages des films de Woody Allen ont cette capacité a perdurer dans nos souvenirs trés longtemps. Moi-même dés que je pense à Woody Allen, les images d’un de
    ses premiers films, vu dans les années 70, défilent. J’ai toujours dans la tête ce petit bonhomme enchaîné qui court dans « Tire toi et prend l’oseille ». Depuis il nous a concocté toute une galerie
    de plantureuses blondes dont les viscissitudes urbaines hantent nos neurones.

  2. Barbara

    c’est fort bien dit cher Gérard ! Woody nous enchante en quelque sorte

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