Festivals de Cinéma

A la vie à l’amour

Posted by adminBarbara

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La vie d’Adèle (d’Abdellatif Kechiche, Palme d’or lors du dernier Festival de Cannes) que j’ai eu la chance de voir dimanche soir dans le cadre du Festival Paris Cinéma, confronte deux mondes. Celui au sein duquel on mange des pâtes à la bolo et celui au sein duquel on mange des huitres.

Bien évidemment et heureusement pour moi / nous il y a bien d’autres choses à ressortir de ce film, de cette oeuvre à part dans le cinéma français et même, si j’osais le dire, mondial.

La vie d’Adèle bouscule, surprend, émeut ou pas, irrite ou ébahit mais ne laisse en rien indifférent. La vie d’Adèle est un « film monde » qui regroupe, je pense toute l’essence du Cinéma.

Dès les premières secondes, nous faisons la connaissance d’Adèle, une jeune fille de 16 ans inscrite au lycée de Lille en 1ère littéraire. Adèle est une ado comme tant d’autres. Elle est un peu mal dégrossie, pas très bien dans sa peau, a des problèmes avec ses cheveux dont elle ne sait que faire et qu’elle tire finalement en queue de cheval approximative de laquelle s’achappent des mèches qui viennent lui cacher le visage (détail frappant et typique du mal être de l’adolescence), a dans la tête des miliards de questions. Mais Adèle a cette vivacité d’esprit mêlée à cette tristesse dans le regard qui font qu’on la remarque et qu’elle marque.

Adèle vit ses premiers émois amoureux dans les bras d’un garçon qui fréquente le même lycée, sans grande conviction. C’est en effet dans les bras d’Emma qu’elle va, peu à peu se libérer et apprendre à devenir femme.

Le film débute pour nous emmener dans un tourbillon fait d’amour, de tendresse, de passion et de chagrin.

C’est là même que les mondes se confrontent. Adèle (Adèle Exarchopoulos : LA révélation de cette année, bluffante de force et de sensibilité) la pragmatique qui rêve de devenir instit’ car elle aime les enfants mais aussi et surtout parce que c’est un « vrai » métier rencontre donc Emma (Léa Seydoux : pas transcendante mais toujours juste et fraiche) l’artiste peintre philosophe libérée qui évolue au sein d’un milieu culturel très riche.

C’est bien simple, la scène de leur toute première rencontre (et je précise qu’elles ne font que se croiser dans la rue sans même se parler) est à vous hérisser les poils. Cette scène est d’une puissance de suggestion hallucinante.

Si vous connaissez le cinéma de Kechiche vous savez qu’il aime filmer la vie, les gens dans leur « réalité ». Il aime prendre son temps d’où des scènes qui font parfois plus de 15 minutes sans aucune interruption : il filme jusqu’à l’épuisement. Il filme en continue, sans interruption aucune comme pour déceler la vérité, les secrets cachés de ses acteurs / actrices. Il les décortique pour offrir au spectateur une expérience sans précédent qui nous prend aux tripes.

La vie est en face de nous, sur l’écran, encore plus forte que jamais.

Ainsi, voir Adèle évoluer et devenir femme devant nos yeux nous semble être la chose la plus naturelle possible.  Telle un parent j’ai eu cette sensation de participer à l’émancipation d’Adèle, à son passage à l’âge adulte (le film raconte son histoire depuis ses 16 ans jusqu’à l’âge de son premier poste en tant qu’instit’ : 24 ans ans environ).

Leur histoire d’amour est forte, au delà des mots. Elle leur permet à chacune de trouver leur place dans une société qui semble vouloir diviser les gens. Une société qui semble vouloir dire que seuls les mieux armés pourront s’en sortir. Les mieux armés étant ceux qui « rentrent dans le moule » d’une société basé sur des principes assez conservateurs.

Kechiche filme l’enfance et la jeunesse comme personne. Les moments qui m’ont peut-être le plus touchés sont ceux où il filme les enfants dans la cour de récréation et la scène d’anniveraire d’Adèle : tous expriment, de façon différente certes, ce besoin de s’ancrer dans le monde, de trouver et de prendre sa place.

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Une chose m’a quelque peu gênée dans le film cependant, je n’ai à aucun moment sentie Adèle vraiment heureuse. J’ai eu cette sensation qu’elle ne parvenait jamais à vraiment se sortir de ce mal être quasi constant, à sortir de sa carapace. Elle reste toujours presque en retrait, a du mal à s’affranchir de l’éducation qu’elle a reçue. C’est en ce sens que j’ai eu du mal à entrer au coeur de leur histoire et a vraiment partager la force de leur amour. Non pas que je n’y ai pas cru mais pour moi, l’amour libère à cent pour cent de ses inhibitions, de ses peurs, de ses manquements (du moins j’aspire à ce que l’amour puisse offrir cela) et je ne l’ai pas ressenti dans leur histoire à toutes les deux. D’où un manquement.

C’est ce que je retiens de ce film d’ailleurs, une telle force de frappe, de suggestion – et pas que de suggestion, vous avez dû entendre parler des scènes de sexe qui sont tout sauf suggérées mais qui, comme dans L’inconnu du lac dont je vous parlais récemment, car elles sont filmées avec respect parviennent à ne pas heurter le spectateur… bon ok j’ai tout de même entendu quelques personnes se racler la gorge pendant les dites scènes comme pour masquer une gêne ! – font que ce film est une oeuvre à part, qui marquera l’histoire du cinéma c’est certain.

J’avais personnellement été beaucoup plus touchée par La graine et le mulet (un précédent film de kechiche) qui je trouve, parlait encore plus fort et plus vrai.

Toujours est-il que ce film vient nous prouver que le cinéma français est vivant, qu’il est en marche, qu’il ose des choses inédites qui participent de l’évolution des mentalités, des moeurs et des pensées.

L’amour comme étendard, l’amour comme pilier de vie, comme guide et comme garde. C’est un plutôt joli programme.


 Pas encore de bande annonce mais ces deux extraits déjà disponibles :

 

 

 

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