Le nouvel opus de Bruno Dumont (P’tit Quinquin, Jeannette…) est tout à la fois un portrait de femme et la photographie d’un pays. Et le propos est âpre, et grinçant.
En bon observateur acerbe qu’il sait être, Bruno Dumont dépeint une société asphyxiée par l’événementialisation du monde et la scénarisation des événements qui y ont lieu.
Tout cette action est intégrée dans un écrin qui n’est autre que celui créé par les flashs info en continu et la recherche du (bad) buzz (toujours plus opportun que le bon buzz apprendra t-on).
Le réal donne à voir cette véritable société du spectacle et tire à boulets rouges sur la sphère médiatico-politique qui impose son rythme et dicte les régles de la vie du pays. Cette même alliance (médias et politique) qui vient s’écharper sur les plateaux de télé lorsque ses protagonistes dinent en ville et font amis amis dans « la vraie vie ». C’est tout cet imbroglio qui est pointé du doigt et puissamment dénoncé.
Et puis ce portrait d’une femme, vedête de la télévision en proie aux limites que lui impose son métier passion semble t-il incompatible avec la vie de femme et de famille qu’elle aimerait pourtant tant parvenir à gérer. Léa Seydoux lui prête ses traits avec brio. Entre rire et larmes, elle fait de cette présentatrice une personne entre deux eaux, adulée mais esseulée, engagée mais égoiste, aux confins de la dépression. On ne sait jamais vraiment où elle se situe : si elle est vraie ou dans une totale posture et elle joue sur le fil avec une vérité très fine et délicate. Cette moue de petite fille lorsque l’émotion l’étreint vient s’opposer à son physique trè féminin et glamour. Tout se joue et tout se dit dans cette nuance justement.
Si le film traine trop en longueur – après une première partie qui m’a tenue en haleine, j’ai trouvé que la fin ne semblait jamais arriver – il tient sa puissance par sa scène d’ouverture, savamment orchestrée, durant laquelle France De Meurs (Léa Seydoux donc) pose une question au Président Macron lors d’une conférence de presse. Tout se dit dans cette scène durant laquelle est présenté le duo explosif qu’elle forme avec son assistante survoltée Lou (également excellente dans son rôle, Blanche Gardin). Là, déjà à ce moment, tout est dit de cette culture du paraitre, de cette société qui mise tout sur l’image, de cet entre soi et de cette porosité au sein d’une élite qui a perdu de sa superbe et tente de se raccrocher aux branches pour faire vivre, encore un peu, tant que cela sera encore possible, ce monde capitaliste moribond.
Pas de fond, juste la forme.