Tout commence par une naissance et avec elle, toutes les promesses et les devoirs que cela engendre. La responsabilité que représente la venue au monde d’un nouvel être. Et toute la grâce du cinéma de Guédiguian se révèle déjà.
On entre alors dans le quotidien de cette famille unie où chacun tient un rôle. Comme toujours chez Guédiguian c’est la débrouille, la hargne, la vérité, la gentillesse et la dignité des gens qu’il filme qui nous éblouit. Tous portent en eux une force héritée d’années de galère qui les obligent. Les obligent à ne jamais courber l’échine, à batailler deux fois plus pour obtenir un minimum. Guédiguian est passé maître dans la façon qu’il a de faire briller les plus bas dans l’échelle sociale pour illuminer leur richesse humaine.
Mais Robert est en colère. Plus que jamais. Une colère implacable et il le dit. Son film s’en ressent et souffre parfois d’un côté trop démonstratif mais on le pardonne tant le propos est fort et important.
La France n’est plus un pays qui créé l’unité. Bien au contraire, il cherche par tous les moyens à diviser et pis encore, à diviser les gens qui se serraient alors, autrefois et il y encore peu, les coudes. Le constat est amer. La misère est telle que chacun s’accroche à son petit bout de confort et délaisse le collectif. Triste conséquence d’une société bouffée par le capitalisme qui porte aux nues l’indivialisme.
Comme toujours chez Guédiguian le propos est politique. Il filme son petit lopin de terre (comprenez sa belle Marseille et sa troupe de toujours) et dit une histoire de l’humanité toute entière. En cela son cinéma me touche très profondément car il tient en lui la capacité à parler à tous. Il porte en lui un grand sens universel.
Implacable, il met en lumière les dérives d’une société qui pousse tout un chacun à « devoir faire de l’argent » non même pas pour subsister mais pour exister pour tenter de se faire une place. Les dérives d’une société qui n’offre plus, à personne, une quelconque certitude en l’avenir, on voit alors à horizon de trois mois tout au plus sans jamais être sûr de pouvoir se projeter.
Ceux qui s’en sortent, ces fameux « premiers de cordées » comme présentés par notre Président lors d’une allocution déjà dans les annales, sont bouffés par leur arrivisme, perdus dans leur quête qui ne laisse aucune place à l’épanouissement.
Ce film gagne à ne pas « parler vieux » comprenez qu’il ne dit jamais « que c’était mieux avant » et ne divise pas l’ancienne génération de la nouvelle. Le personnage d’Ariane Ascaride, le pivot de l’histoire est elle-même, en quelque sorte une représentante doublée d’une victime des dérives de ce capitalisme meurtrier. Elle ne croit plus au collectif : présenté comme étant le seul rempart contre les dérives de notre monde.
Tout le propos trouve comme écrin une Marseille moderne, que je n’avais encore jamais vue au cinéma… Une métropole méditerranéenne sans relief, au caractère neutre et uniformisé.
Il est temps de retrouver notre âme.
*ainsi passe la gloire du monde