J’ai dans mon entourage quelques grands supporters des frères Coen. Personnellement, j’avoue garder un souvenir bluffant et très fort de leur No Country for old men sans pour autant avoir suivi tous leurs films par la suite. Cela dit, il était inpensable que je manque leur dernier opus Inside Llewyn Davis, remarqué et primé à Cannes. Je sentais qu’il s’agissait là d’un beau portrait d’homme et d’un périple fort et puissant.
Il est clair que les frères Coen nous livrent ici le portrait, certes magnifié, d’un loseur magnifique.
Comme le titre le laisse supposer, les frères Coen nous embarquent « à l’intérieur », dans l’intime de ce chanteur de folk à qui rien ne semble vraiment réussir.
Il y a dans ce portrait une vraie dose de mélancholie et les réal posent sur leur personnage un regard à la fois amusé, très respectueux et presque désolé. Il faut dire que ce Llewyn semble avoir de grandes qualités – musicales déjà – et puis humaines comme son refus de la compromission qui l’obligera à devoir renoncer à sa passion musicale. Mais voilà, Llewyn est un perdant. Il rate tout ce qu’il entreprend de façon systématique, presque avec grâce et grand art ! Il maîtrise l’art de la défaite avec brio.
Llewyn est un homme bon, ça saute aux yeux et les frères Coen semblent vouloir nous dire qu’il n’y a pas de place pour les trop gentils dans ce monde.
L’on comprend qu’il vit également dans le regret, le manque de son ancien « binôme » et ami, qui s’est suicidé sans raison apparente (« Il était tellement plein de vie dira son père »). On imagine facilement Llewyn trainer sa misère depuis, squattant l’appart de l’un et de l’autre, comme désemparé…
Inside Llewyn Davis c’est en fait l’histoire d’un mec qui se trimballe un chat roux (prénommé Ulysse) en attendant de pouvoir le rendre à ses propriétaires…Ce sont des gens aux physiques parfois étranges (les invités de « sa famille d’accueil »), ce sont des musiques folk qui définissent et expriment toute la mélancholie d’une vie.
Llewyn est de ceux qui font les mauvais choix, qui sont gaffeurs, qui croisent les mauvaises personnes et qui sont là au mauvais moment, qui s’embourbent dans la neige alors qu’il suffirait d’emprunter le chemin d’à côté : lui déneigé : oui, ça fait beaucoup ! Il cumule les difficultés et c’est en cela qu’il m’a touchée. Il n’a en tête que la volonté de percer dans la musique et a des billes pour cela : un certain talent déjà, puis des connaissances qui pourraient lui permettre de faire de bonnes connaissances justement (son amie Jean qui l’invite à venir jouer au club le soir ou les journalistes du Times seront présents).
Maic voilà, Llewyn préfère suivre sa propre voie. Et cette voie ne semble mener qu’aux ennuis.
La fin du film, identique à la scène d’ouverture vient nous dire qu’il est condamné à une vie de bohème… La question est de savoir s’il s’y condamne tout seul ou si c’est une question de destin, de malchance ou de poisse.
Inside Llewyn Davis est en fait « une odyssée de la lose » sans fin. Et c’est touchant, très touchant.