Je m’étais pourtant juré de ne plus voir un film d’Emmanuel Mouret. J’avais été trop déçue par ses films maniérés, vieillots, transis d’une atmophère globale trop classique et si j’osais je dirais un peu moisie.
Un blogueur / journaliste a très récemment lancé un petit questionnaire sur Twitter nous demandant quels sont les acteurs qui nous font aller voir un film, au cinéma. J’ai alors pu répondre sans ciller que pour ma part il était question (entre autres) de Cécile de France et Edouard Baer. C’est en tout cas bel et bien ce duo qui m’a décidé à aller voir ce Mademoiselle de Joncquières, film en costumes de surcroît – autant dire, bien loin de ce sur quoi je me rue en salles (bien que mes goûts soient, vous l’aurez remarqué, assez éclectiques.)
Cette affaire de libertinage, amour, tromperie, revanche, vengeance et féminisme en bandoulière m’a totalement embarquée. Et ce film parfaitement calibré m’à procuré une très belle expérience de cinéma.
Ce film c’est déjà un duo. Cécile dont on aime la fraîcheur non feinte et semble t-il éternelle depuis ses touts débuts chez Klapisch est épatante de naturel : elle est cette veuve, riche et heureuse d’en avoir fini avec l’amour suite à ce début de vie passée aux côtés d’un mari pour lequel elle n’éprouvait guère plus que de la tendresse. Les désarrois du mariage.
Lorsque le marquis des Arcis – génial Edouard Baer qui apporte la parfaite touche de son dandysme naturel au rôle – vient alors la courtiser, c’est dans un premier temps assez convaincue qu’elle décline pour finalement tomber pour lui, son charme, son charisme.
Les deux sont sur l’exacte même longueur d’onde et nous livrent une prestation qui frôle la perfection. Les dialogues sont ciselés et à aucun moment il n’est question de lourdeurs ou de maladresse dans l’adaptation et la retranscription de ce texte de Diderot.
C’est drôle, enlevé, frais et jamais cadenassé. On respire et on prend le temps de suivre cette histoire d’amour qui se transformera bien assez vite en histoire de vengeance.
Le tout est jubilatoire.
Au final, Emmanuel Mouret touche du doigt avec brio la question épineuse du féminisme sur laquelle on lit et entend tout et n’importe quoi. J’aime le message de ce film qui dit que rien de bon ne peut émaner d’une quelconque action menée avec haine, rancœur et volonté de nuire.
Le projet fomenté ici par le personnage de Cécile de France est voué à l’échec dès le début. Jamais personne ne pourrait parvenir à changer quoi que ce soit, encore moins le comportement ou les mœurs d’un être humain avec pour seul arme la vindicte.
Mouret nous dit que seul l’amour, le plus pur et sublime qui soit, modère, permet d’opérer des changements radicaux qui, possiblement, peuvent alors permettre à la condition humaine d’évoluer.
Totalement vibrant d’actualité. Ce film livre une vraie réflexion et prise de recul sur les mouvements Me too, Balance ton porc et consort.
Comble ultime, Emmanuel Mouret nous livre ici avec ce film d’époque son film le plus moderne. Totalement à l’image des affres féminines et masculines de notre temps.