Le jeu de dupes est total et alambiqué. Jusqu’à semer le doute dans ce l’on pourrait percevoir comme étant une antithèse de la saga James Bond. Le glamour est bel et bien présent par la présence de l’actrice principale, Jennifer Lawrence, mais l’atmosphère se veut bien plus glacée, âpre et violente.
Rien ne nous est épargné dans ce film qui nous raconte le parcours de cette jeune ballerine du Bolchoi recrutée contre son gré (sous la menace voire la promesse de soigner sa mère malade, tout dépend de là où l’on place le curseur) par les services secrets russes.
La voilà alors dans une école de formation qui lui apprend à dévérouiller les serrures les plus sécurisées ou encore à user de son corps et de son esprit comme d’une arme de séduction massive. Tout cela sous les traits mi ébahis mi tétanisés de tonton (définitivement excellent Matthias Schonaerts) qui veille au grain et à son poulain.
Car cette affaire est avant tout une histoire d’inceste sous-jacent et de cet oncle manipulateur et pernicieux qui tient là, le moyen de soudoyer sa nièce alors à la fois chérie et détestée.
La psychologie est complexe mais le scénario ne l’est pas. Moins encore la mise en scène, classique au possible.
Quand les réal arrêteront-il de vouloir nous attirer / épater avec l’idée de « faire du beau », ou « faire du sensationnel » ? J’aime que le cinéma se vive non pas uniquement par le dégoût ou la peur mais via une palette de subtilité et un appel aux émotions nuancées.
Ici, ce sont très nettement les scènes de torture qui mènent la danse et viennent réveiller un film plutôt « pépère ». Des scènes d’une violence telle qu’il est quasi insoutenable de garder les yeux sur l’écran (cette scène d’épluchage me donne encore des frissons). Pourquoi une telle dureté avec le spectateur ? Je perçois cela comme une provocation quelque peu creuse et vaine. C’est alors ça ce que l’on doit garder en tête ? Le travail sur des effets de haute volée ? Clairement pas ce que je recherche car perçu comme trop racoleur.
Je garde en tête le jeu subtile et juste de Jennifer Lawrence qui parvient à garder de bout en bout cette réserve et cette « lourdeur » dans la légèreté ultime (en tant que danseuse) qu’elle incarne.
Et puis il y a Matthias Schonaerts ici mi Hitler (rapport à la coupe) et mi Poutine (rapport à la froideur de l’homme et au pays) qui frise le génie avec une partition peu évidente car forcément caricaturale. Il endosse ce rôle avec un recul tel qu’il en devient effrayant de déterminisme glauque.
Le travail sur la langue (en VO) peaufine l’aspect très travaillé du film (l’accent russe travaillé des acteurs) mais le tout reste bien trop caricatural et désincarné et je m’ennuie.