On est bien au coeur du cinéma de Sofia Coppola, immergés dans une violence et une solitude assourdissantes, toutes deux enfermées dans un écrin rose poudré.
Sofia C nous a montré la solitude extrême dans un hôtel de Tokyo, au sein des salons de la cour à Versailles, dans un pensionnat, le mal être d’adolescentes enfermées dans la banlieue puritaine américaine, l’ennui ferme dans un hôtel de luxe hollywoodien, la délinquance huppée… Son Priscilla, du nom de l’épouse du king Elvis Presley recoupe un bout de chacun de ses films précédents pour en devenir un archétype de son cinéma de adolescence.
On y retrouve alors ces plans feutrés et toujours très bien ficelés qui disent la prison dorée dans laquelle la jeune fille se retrouve enfermée. Car le jeune Elvis, sous ses airs de jeune premier, est l’homme le plus rance que l’on soit sans doute jamais amenés à rencontrer.
Sa jeune amoureuse se doit de rester vierge jusqu’au jour où il aura décidé « du moment venu » : on saluera au passage le haut respect et la prise en compte des désirs de sa compagne. Elle se doit de mettre en valeur sa silhouette, de maquiller ses yeux comme il se doit et de colorer ses cheveux comme bon lui semble, à lui ! Bref, un bon petit soldat qui dicte sa conduite à une femme qu’il dit aimer mais qu’il souhaite réellement enfermer. Mettre en cage. Son si joli petit oiseau !
Ce film est alors l’histoire d’une révolte. D’une prise de conscience déjà. D’une descente aux enfers avant cela. D’un conte de fée au premier abord.
Car oui, le film détricote ce rêve américain. Ce bonheur de façade, cette vie idéalisée sur papier qui ne fonctionne à aucun égard dans la vraie vie.
L’actrice ne brille pas mais incarne avec justesse cette jeune femme farouche qui s’endurcira au gré de cette vie qu’elle pensait pourtant emplie de douceur et de légèreté. Qu’elle avait vu toute écrite et tracée.
Son destin l’amènera loin de là où elle aurait pensé arriver, sans aucun doute pour le meilleur. Car qui voudrait d’une vie rose bonbon entachée de toute la crasse d’un homme possessif qui vous veut dans sa propre cage aussi dorée soit-elle ?
Cours, vole ma fille !
