Ce qui reste de la puissance de ce film, c’est sa faculté à dire, à montrer, à humaniser les victimes qui n’ont jamais été entendues.
Revoir Paris évoque la vague d’attentats survenus à Paris il y a quelques années. Cet événement tragique dont le procès vient de se refermer et qui, nous l’espérons, aura aidé les plaies des victimes – de toutes les victimes – à se refermer quelque peu. Une gageur sans doute tant ce type d’événement hors du commun laisse des traces indélébiles.
Ce film, signé Alice Winocour, dont le petit frère fut blessé au Bataclan dit avec délicatesse la remontée à la surface d’une femme devenue amnésique du fait du choc survenu.
Et quel plus beau parcours que celui d’une renaissance. Il faut la voir (Virginie Efira) encore une fois d’une présence et d’une justesse majestueuse et délicate. Elle trouve la focale sans forcer. Elle est à sa place dans le rôle. Sans aucun pathos ou fausse pudeur. Elle est là, sans s’excuser de rien et toute affairée à dire, à vivre et sans doute toucher du doigt la douleur ressentie avec un événement traumatisant d’une telle intensité.
« Jamais avant je ne me demandais si j’étais heureuse ». Il est question d’un renouveau, de la possibilité d’un nouveau pan de vie. D’une femme qui va – finalement – de l’avant.
Mais plus encore que cette histoire là – et c’est là que le film trouve tout son sens – le film a un second niveau.
Au delà des personnages de Virginie Efira et de Benoit Magimel, il est question d’un jeune cuisinier du restaurant (le film relate un attentat ayant eu lieu dans un restaurant), sans papier, ayant disparu juste après l’attentat se privant de la possibilité de bénéficier des professionnels et autres bénévoles venant en aide aux victimes.
Et c’est définitivement ce pan là de l’histoire qui m’a le plus touché. Montrer, humaniser les invisibles de nos sociétés. La réalisatrice réussit là un tour de force en apportant une vrai touche de mansuétude et d’humanité.
Ils sont si nombreux à avancer seuls. Voyons les. Regardons les. Ce film nous en donne un aperçu et remplit ainsi son rôle de catalyseur. Je suis sortie de ce film (vu en avant première au Louxor en juin, lors de la reprise de certains films présentés à Cannes dans le cadre du festival, en présence de sa réalisatrice) très émue et touchée d’avoir pu m’ouvrir un tant soit peu à des personnes auxquelles je ne pense que trop peu. Des personnes que je croise pourtant qui ignorent tout de moi certes, dont j’ignore le sort souvent compliqué.
Du rôle social du cinéma, dans toute sa délicate splendeur. Un cri du coeur pour dire que les drames peuvent aussi réunir et rassembler.